Comment présenter quelque chose qu'on aime passionnément? En l'occurrence le premier court-métrage d'un cinéaste souvent décrit comme grincheux, L'Amour existe (1960) de Maurice Pialat? Pialat? L'amour? Mais c'est pas lui qui brandissait le poing à Cannes, lorsque face à l'annonce de sa Palme d'Or pour Sous le soleil de Satan, la salle sifflait? Lui qui leur a dit "vous ne m'aimez pas? Eh bien moi non plus je ne vous aime pas"? Ben si. Vous voyez qu'il s'agit d'amour.
L'Amour existe commence comme du Proust : "Longtemps j'ai habité la banlieue." Pourtant, ce n'est pas juste une autobiographie de la vie en banlieue. C'est l'histoire d'une mutation urbaine, d'une mutation des habitudes de consommation, des impératifs de déplacement et de leurs poids sur les vies, les manières d'habiter les maisons, les modes de regroupement, la relation centre-périphérie, l'incidence de l'espace sur les rêves et les possibles, sur les sentiments et les actions. Peut-être que ce que Pialat crée avec ce film c'est un outil de mesure bien singulier de la mise à l'écart. Un outil de mesure qui n'est pas issu d'une discipline académique, mais d'une discipline du regard. Après tout, le film se referme sur ces paroles :
La leçon des ténèbres n’est jamais inscrite au flanc des monuments. La main de la gloire qui ordonne et dirige, elle aussi peut implorer. Un simple changement d’angle y suffit.
Et pour ceux qui voudraient mâcher le texte sans les images, on peut en trouver la retranscription ici.
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